Le Special Operations Executive (SOE) ou Service des opérations spéciales, appelé encore « Baker Street », du nom de la rue où était implanté son Quartier général à Londres, a été créé en juillet 1940 à l’initiative du Premier ministre CHURCHILL.
Il correspondait dans les services britanniques à ce qu’on appelle, dans les services spéciaux français, un service action, en principe rigoureusement séparé des services de renseignements et de contre-espionnage de l’Intelligence Service (IS), et sans lien avec les réseaux de la France libre relevant du Bureau central de renseignements et d’action (BCRA) et du Bureau des opérations aériennes (BO).
Le SOE est né de la fusion de deux sous-services, le Military Intelligence Research (MIR), c’est-à-dire le service de renseignements militaires détaché du War Office ( ministère de la Guerre ), et la section D (Destruction) détachée du MI 6 (service de renseignement).
Ainsi constitué, le SOE fut placé sous la tutelle de l’Economic Warfare, le ministère de la Guerre économique. Il n’était pas soumis à la hiérarchie militaire britannique, et constituait une organisation, qui relevait directement du Premier ministre CHURCHILL et de quelques ministres concernés par son activité.
Sa mission était d’effectuer des actions d’intoxication, de sabotage et de guérilla en territoire occupé, visant à affecter le moral des Allemands, à les déstabiliser, en sachant bien que ces actions ne manqueraient pas d’entraîner des représailles au sein des populations. Ce risque était prévu et assumé, et le SOE attendait de ces représailles, qu’elles creusent le fossé entre les occupants et les populations, dont les Allemands cherchaient à attirer la sympathie en se comportant de façon qui pouvait apparaître comme courtoise.
Conçu à l’origine dans le cadre d’une stratégie défensive visant à empêcher sinon à retarder une possible invasion des îles britanniques, le SOE s’est ensuite inscrit dans une stratégie résolument offensive de préparation du débarquement allié et de reconquête du continent européen, avec dès le début, le souci non dissimulé des Britanniques d’armer le plus grand nombre possible de « non Anglais » afin de limiter les pertes britanniques.
Le SOE contrôlait de nombreux centres d’entraînement (Training Schools) implantés en Angleterre et en Écosse, et d’importants moyens logistiques par mer et par air ont été mis à sa disposition par la Royal Navy et la Royal Air Force.
La section française du SOE, fut d’abord administrée par Hary MARROTT, puis à partir de septembre 1941, par un lieutenant-colonel de réserve, Maurice BUCKMASTER, qui avait résidé avant la Seconde Guerre mondiale en France, où il avait exercé successivement la profession de reporter au journal Le Matin, puis de cadre chez Ford France.
BUCKMASTER n’était pas spécialement préparé à assumer cette fonction de chef du SOE, et beaucoup après la guerre lui ont reproché son incompétence ou pour le moins son amateurisme, qui aurait été à l’origine de bien des drames.
Son adjoint au sein de l’état-major de la section française du SOE est Nicholas BODINGTON, alias Nick. Correspondant à Paris de l’agence Reuters et agent de l’Intelligence Service, il y avait fréquenté avant la Seconde Guerre mondiale Karl BOEMELBURG, un agent allemand devenu le chef de la Gestapo à Paris sous l’Occupation, et Henri DÉRICOURT, un pilote français qui sera soupçonné après la guerre d’avoir été un agent double au service de l’Abwehr et de la Gestapo. Très lié à Sir Claude DANSEY, adjoint du chef de l’Intelligence Service, BODINGTON devient l’instrument du MI 6 au sein du SOE.
La section française du SOE a formé et envoyé plus de 450 à 500 agents en France, dont une quarantaine de femmes, et une trentaine de Canadiens très appréciés pour leur connaissance du français.
Ces agents ont servi au sein d’une centaine de réseaux et sous-réseaux, généralement désignés en France sous le nom de réseaux Buckmaster.
Selon Benjamin COWBURN, chef du réseau SOE Tinker dans l’Aube, les agents du SOE devaient réunir trois qualités essentielles, « Intelligence, résolution et discrétion », et ne pas se préoccuper des opinions politiques des personnes qu’ils recrutaient en France, et dont il fallait seulement se préoccuper de la moralité et de la force de caractère.
Néanmoins, le SOE a été réticent à fournir des armes aux organisations de résistance d’obédience communiste, tels que les Francs tireurs et partisans français (FTPF).
« Véritable arsenal de la Résistance » selon Henri MICHEL, le président du Comité d’histoire de la 2e guerre mondlaie à sa création, le SOE a parachuté plus de 5 000 tonnes de matériel sur le territoire français : plus de 100 000 fusils, des dizaines de milliers de mitraillettes Sten, des millions de cartouches, plus de 1 000 mortiers, des centaines de milliers d’obus de mortiers et de grenades à main, des centaines de postes émetteurs-récepteurs, de grandes quantités de tenues et de chaussures de combat.
Les agents SOE parachutés en France disposaient d’importantes sommes d’argent qui leur permettaient de subvenir à tous leurs besoins.
Parmi eux, 130 ont été arrêtés et beaucoup sont morts, torturés, emprisonnés, déportés, exécutés.