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Le secteur cristal 5 du Mouvement Combat est sous la responsabilité du Dr Emile Mercier de Nantua dès 1942, il recouvre au de-là du canton. Lors de l’unification des mouvements, sous le sigle des M.U.R. (Mouvement Uni de la Résistance) l’organigramme reste inchangé.
A La Cluse et Montréal, les familles Lucien Chevrier, André Lacraz, Robert Lacroix, Jean Ritoux animent la Résistance dans les 2 villages.
1943 – Le camp de Triage de La Ferme du Mont
A l’été 1943 le capitaine Petit dit Romans est chargé par le bureau départemental des M.U.R. de prendre en charge les camps de réfractaires au Service du Travail Obligatoire (STO). Il va structurer ces camps, les “militariser” pour transformer ces “Réfractaires” en véritables “soldats de l’ombre” dans des Camps de Maquisards, dicéminés sur le Plateau de Retord-Hauteville et la Vallée de l’Ain.
Dans le cadre d’une amélioration de la sécurité des camps de maquis, Romans met en place en aout 1943, un camp de triage à la ferme du Mont, pour « filtrer » les nouveaux arrivants.
Les différentes filières d’accès au Maquis sont dirigées sur La Cluse, avec comme point de chute l’hôtel Chevrier en face de la gare ou le « casino » de Jean Ritoux.
D’autres points de chute sont à Cize et Montréal.
Ce centre de triage est tenu par le Gabriel Even, “Mystère”, quarantenaire passé, issu de la marine. Il est secondé dans sa tâche par deux étudiants lyonnais, par Jean Bouvier “Hibou” étudiant candidat à l’agrégation d’histoire, de “Marcassin”, de Lançon et de “Maria-Mâtre”, un alsacien.
Le centre de triage est intégré au groupement Nord de Montréal. Le ravitaillement est assuré par Ritoux, gérant du Casino de La Cluse.
Le point de chute des filières conduisant au camp de triage est l’Hôtel de la Gare à La Cluse dont le propriétaire est Lucien Chevrier.
Pris en charge par une équipe du camp de Triage, les recrues sont emmenées au camp de nuit et dénudées à leur arrivée, leurs effets sont fouillés. Ayant perdu, dans cette tenue leur assurance, ils subissent un long interrogatoire de la part d’un père “Mystère” très soupçonneux. Ils passent ensuite une visite médicale pour voire leur aptitude.
Un fois déclarée bon pour le service, la recrue reste 2 à 3 semaines dans ce camp, où elle est formée à la discipline.
La « quarantaine » effectuée, les bleus intègrent un camp, un camp de Maquisards!
La première promotion avec pour chef Boghossian, part au camp de Pré Carré (prés du Petit Abergement), en pleine création.
Henri Girousse “Chabot”
Vers la fin août 1943, Chevrier, qui tient l’hotel de voyageurs à la gare de La Cluse, présente un nouveau au capitaine Romans, Chabot.
Ancien Saint-Cyrien et officier de tirailleurs, le lieutenant Chabot rejoint le Maquis. Grand, de belle prestance, un sourire ironique au coin des lèvres, Chabot est aussi diplomate et habile que Montréal semble entier et brutal. Le capitaine Romans lui confie le commandement des Camps des plateaux : d’Hotonnes et d’Hauteville, l’organisation et la création de nouvelles unités dans tout le Valmorey.
L’ensemble doit constituer le Groupement Sud. De la même façon, Noël Perrotot “Montréal” se voit attribuer le commandement des camps du Haut-Bugey réunis sous le nom de Groupement Nord.
En marge du Défilé du Maquis à Oyonnax le 11-11-1943
Les maquisards après la manifestation rejoignent leurs cantonnements. Ils prennent au plus court pour rentrer: la route de La Cluse où ils passent par la route de Montréal à La Cluse qui mène au cinéma, puis les camions longent la voie de chemin de fer pour éviter la Kommandantur occupant l’Hôtel Vuaillat du carrefour. Ils rejoignent alors Corlier pour le Camp Verduraz et le Petit-Abergement pour le camp de Morez (“Marco”).
Sabotage ferroviaire 2 février 1944. Témoignage de Pierre G. Jacquot
Un soir, le 2 février, l’enthousiasme renaît. Au camp un ordre arrive: deux usines de La Cluse sont à saboter dans la nuit.
Enfin du travail! Le plastic sautera. Mais quels sont les élus qui formeront l’équipe d’action?. La question est d’importance. Goyo avait déjà reçu une mission qu’un contre-ordre avait annulée: détruire le tunnel de Charix pour interdire la ligne de Bellegarde.
Pour le dédommager de sa peine — il avait parcouru quarante kilomètres de montagne dans la neige pour reconnaître son premier objectif — Michel le confirme dans le coup de main. Il emmènera avec lui une équipe complète. Il s’agit de réussir à la barbe des G.M.R.
La gare, nœud ferroviaire important,est dévolue au G.F. Pesce. Les scieries de deux collaborateurs notoires (!? nadlr): Thomasset et Déguerri, à Goyo. Bébé dirige l’expédition.
À deux heures du matin, les explosions retentissent, ébranlant la ville. La plaque tournante de la gare et les aiguillages sont arrachés. Pesce promet bien de sa future spécialité de «terroriste du rail».
Dans les deux usines, les machines sont hors d’état. Il est vrai que Bébé a un peu exagéré les charges prévues. Non seulement vitres et toitures sont brisées maisle feu se met de la partie…
1944- Période de Pâques – Opération Frühling
Dans le cadre des Opérations allemandes Frühling, la soldatesque encercle les Monts du hauts Jura pour anéantir les Maquis du Groupement Nord (Chef Perrotto dit Montréal). C’est un échec, les Allemands s’en prennent à leurs soutiens. Ainsi les époux Coupat et ses deux enfants sont arrêtés le 8 avril et déportés le 12 avril 1944:
COUPAT Daniel Claude | né le15/03/1929 – matricule 34076 |
COUPAT Henri | né le 19/03/1895 – matricule 34077 |
COUPAT Jean | né le 27/01/1926 – matricule 34078 |
COUPAT née VAISSE Germaine | née le 10/06/1899 – matricule 38817 |
Henri Coupat décède au camp de Neuengamme le 11-03-1945, son fils Daniel Claude décède lors de la libération des camps le 8-05-45, son épouse Germaine déportée à Ravensbrück revient, son fils Jean, est rentré le 26/04/1945 (lieu non connu), il sera élu Maire à la Libération. Les arrestations se font sur liste de dénonciations. La famille Coupat appartient à la Résistance, amie de Jean Ritoux (voir plus loin). Jean Ritoux doit passer dans la clandestinité, ses meubles sont remisés dans l’entreprise Coupat. Les Coupat dénoncés ne peuvent nier l’évidence…
Jean Ritoux:
Jean Ritoux est auvergnat, né en 1898 à Meymac en Corrèze dans une famille nombreuse et pauvre. A 7 ans, il part à Paris chez un oncle ; dans sa jeunesse, entre autres occupations, il vend des journaux dans les rues. Au cours de son service militaire, il sert dans l’artillerie au Maroc. Puis, revenu à Clermont-Ferrand, il tient un magasin “Casino” avant de s’établir dans l’Ain à la Cluse, où il ouvre une bonneterie. Il a la quarantaine au moment de la guerre. Communiste passionné, il s’engage très vite dans la Résistance et fait partie des piliers de l’AS (Armée secrète) de la Cluse avec Lucien Chevrier, Robert Lacroix, André Lacraz. Dans le courant de l’année 1943, Jean Ritoux, assisté de Roger Sigod, centralise des renseignements dans son magasin et communique avec Rémond Charvet et Godard, responsables à Bourg-en-Bresse. La maison de Jean Ritoux et l’hôtel Chevrier servent de points de chute pour les jeunes réfractaires qui sont ensuite conduits au camp de triage du Mont, lequel est situé au-dessus de la Cluse et ravitaillé par les soins de l’AS. Dans son secteur, Jean Ritoux organise aussi avec Robert Lacroix et André Lacraz la réception de parachutages, notamment pour le réseau Pimento (Réseau britannique du Special Operation Executive S.O.E. sous la responsabalité de Richard Brooks “Tony”). Il faut noter que ces activités se déroulent à l’insu de la Feldgendarmerie allemande cantonnée à la Cluse.
Jean Ritoux, débordant d’énergie, est apprécié pour sa bonne humeur communicative. Au printemps 1944, lors des attaques allemandes, la maison de Jean Ritoux est pillée et les usines Lacroix et Lacraz incendiées ; Jean Ritoux et sa famille doivent se cacher et trouver un refuge de fortune en montagne. Comme d’autres responsables communistes recherchés, Jean Ritoux a intérêt à ne pas demeurer trop longtemps au même endroit. Il rejoint le P.C. du capitaine Romans qui lui confie le poste de responsable du Service de Renseignement. Plus tard, après avoir consulté “Romans” et le docteur “Ber”, délégué du FN (Front national) arrivé dans l’Ain, Jean Ritoux décide de passer en Saône-et-Loire où on lui confie le commandement du 4e bataillon FTPF (Francs-tireurs et partisans français) comptant une centaine d’hommes, formé de groupes jusqu’ici dispersés. Devenu le Colonel “Ledon”, il est responsable FTPF (Francs-tireurs et partisans français) de la zone Sud du département.
1944 – Juillet – Opération Trettenfeld
Témoignage de MR Antoine Mercier dit “le Sherif” à l’adresse du capitaine Romans des événements de juillet 1944. – Si les faits sont réels, leurs relations telles qu’exposées ont été contestées.(ndlr)
“C’était le 12 juillet. Les Allemands sont signalés sur la route de Pont d’Ain en direction de La Cluse, en vue de représailles contre les résistants et ceux qui les protègent. (Tout est détruit sur leur passage) Le Le chateau de Montréal est occupé par des maquisards sous les ordres du lieutenant Montréal. (Ceux-ci gagneront le maquis dela Pesse)
Tout le monde a peur. Je me présente comme responsable de la commune, à l’arrivée des Allemands sur la Place de La Cluse, quelques amis ont bien voulu m’accompagner. Immédiatement fusillade et 7 personnes sont tuées. L’officier allemand m’interroge au titre de responsable. Mais je ne sais rien. Alors il me présente une liste de gens qui doivent être tués et dont les maisons doivent être incendiées. De suite nous nous rendons à ces adresses, mais les propriétaires sont partis.En fait, quelques grenades sont lancées.
Ce sera tout pour cette journée. Je ne peux regagner mon domicile à Montréal et reste contre mon gré et reste ainsi consigné à La Cluse. (Nuit d’horreur que je ne peux pas raconter)
Le lendemain 13 juillet. Les fusillers de La Cluse ont été placés sur un chariot conduit par un cheval et je les dépose dans un champ sur la commune de Brion -ensuite je me suis occupé de leurs sépultures. (au cimetière de Montréal) 4 blessés (gens de La Cluse) dont une gamine de 3 ans sont soignés par les docteurs Dujardin et Rossand et transportés ensuite à l’hôpital de Nantua. En même temps tous les hommes de la commune sont réunis de force sur la Place de La Cluse. J’ai fait l’impossible pour que le plus grand nombre ne soit pas déporté ou fusillé. (Prétextant que ces gens n’avaient rien à faire avec les maquisards)
Pendant ces jours de représailles j’ai fait l’impossible pour que les gens de la commune soient ravitaillés en lait, farine.
Le 19 juillet: la Gestapo de Lyon se rend à l’hôpital de Nantua pour interroger des blessés, gens de Saint-Rambert en Bugey déja fusillés une première fois.
Ces hommes sont transportés dans une carrière à La Croix-Chalon où ils seront fusillés sans avoir parlé.
Sur la Place La Cluse la Gestapo prévient l’officier allemand et moi-même de ce qui vient de se passer. Prenant avec moi les Dr Dujardin et Rossand, suivant les traces des voitures, nous retrouvons les corps allongés dans la carrière, horriblement mutilés et recouverts d’un matelas. Ces morts seront enterrés au cimetière de Montréal le lendemain matin.
- Pierre Gayat, 56 ans secrétaire de Mairie de Saint-Rambert ;
- André Burtschell, 36 ans, juge de paix à Saint-Rambert ;
- Joseph Marguin, 50 ans, garde-champêtre à Saint-Rambert ;
- Albert Bertin, 17 ans ;
- Mohamed Kheroumi, 25 ans ;
- Roger Morand, 21 ans ;
- Lucien Gay, 24 ans ;
- André Bullon, 20 ans ;
- Jean Vuitton, 28 ans.
Les cadavres de ces hommes sont retrouvés quelques heures plus tard dans la carrière de Montréal-la-Cluse à la Croix-Châlon, alignés sur deux rangs à même le sol. (ndlr)
Outre ces moments tragiques de juillet 1944, je dois aussi ajouter qu’en février 1942 (erreur 1944 ndlr), à la première arrivée des Allemands à La Cluse, nous avons gardé ma femme et moi, pendant plusieurs mois Madame Lacraz et sa fille agée de 3 mois. Leur maison avait été incendiée, son mari et son beau frère chefs de maquis partis dans un centre de résistance. Personne dans la commune n’avait voulu l’herberger par suite de représailles. (déjà connu pour les mêmes raisons)
De plus chaque soir depuis janvier 1942 (erreur 1944 ndlr) nous récupérions à la maison des jeunes gens. (mai-juin 1944 ndlr) Au milieu de la nuit, je devais les faire partir pour un lieu de rendez-vous. J’ajouterai aussi qu’avec Mr Tondereau, garagiste à La Cluse, nous avons ravitaillé le maquis de Mornay, avec des denrées prises au Allemands. (mai 1944 ndlr)
Je tenais à consigner ces détails forts succints sur cette période que nous avons vécue, pour que l’on s’en souvienne et que de telles horreurs ne se renouvellent pas.”
… à suivre