Le vendredi 7 avril 1944, la Division 157 de la Wehrmacht se déploie dans la région de Saint-Claude, dès 4 heures du matin. La Ville est cernée, les locaux de la coopérative La Fraternelle sont mis à sac. Ses responsables qui ravitaillent le maquis sont arrêté ainsi que le Maire de la ville, Paul Delacour, pourtant nommé par Vichy.
Le dimanche 9 avril 1944, jour de Pâques, sous couvert d’une vérification d’identité, la Gestapo organise une grande rafle en présence du sinistre Klaus Barbie arrivé la veille à l’hôtel de France. Tous les hommes de 18 à 45 ans sont rassemblés sur la Place du Pré. 302 de 18 à 45 ans sont retenus en otages et déportés à Buchenwald, 186 ne rentreront pas.
L’arrivée des Sanclaudiens à Buchenwald, situé à quelques kilomètres de la ville de Weimar, aura lieu le 14 mai. En plus des installations du camp, les prisonniers construisent et réparent routes et voies ferrées à un rythme infernal. L’un des Kommandos de Buchenwald s’appelle Dora. C’est là que, quelques jours après leur arrivée, sont affectés la plupart des nôtres. Dora, est le nom de code d’une usine souterraine installée dans le tunnel d’une montagne, où sont fabriquées les fusées secrètes d’Hitler, les V1 et les V2. Ce kommando, terriblement meurtrier devient un camp autonome en 1944 : le camp de Dora.
Témoignage de Lançon Robert, né le 31 mars 1924, arrêté le 9 avril 1944 à Saint -Claude. Déporté à Buchenwald – matricule 52 168 – commandos : Harzungen, puis Ellrich. Appartenait à l’A.S. puis Service Périclès, maquis du Haut – Jura. Habite Lavans les Saint – Claude
Le dimanche 9 avril – jour de Pâques – est marqué à Saint – Claude par une répression aveugle.
Toutes les routes, tous les chemins d’accès à la ville sont fermés et contrôlés dès 7 heures du matin. Devant un déploiement de forces armées sans précédent à Saint – Claude, tous les hommes de 18 à 45 ans doivent sous peine de mort, se rendre pour vérification d’identité sur la place du Pré – aujourd’hui place du 9 avril 1944. C’est près de 2000 personnes qui seront rassemblées et triées durant toute la journée. Deux ou trois délinquants mineurs abrités dans la prison de Saint Claude sont livrés aux nazis par la police française. Les maisons susceptibles de servir de cache à des résistants sont fouillées.
Le soir vers 17 heures, 302 personnes sont retenues, en majorité des jeunes de 18 à 30 ans.
Il est à noter que l’effectif des Maquis à l’époque, devait se situer autour de 400 volontaires. Il est certain que le commandant de la division allemande, ayant reçu l’ordre de nettoyer la région des maquisards qui s’y trouvaient, voulut justifier à ses supérieurs, la réussite de l’opération entreprise. Suite à son échec devant le Maquis, il trouva plus facile de s’en prendre à la population civile. Il lui fallait 300 à 400 personnes, il les avait, l’honneur était sauf.
Toutes les personnes arrêtées seront dirigées vers l’ancienne École Supérieure de Filles où elles passeront la nuit. C’est là que Jean Lugand sera abattu pour avoir bousculé un sous – officier allemand, première victime d’une longue série.
La coopérative La Fraternelle est mise à sac, ses stocks, ses magasins sont pillés, quelques succursales sont incendiées. Plusieurs employés, tous résistants, seront arrêtés ainsi que l’épouse du directeur, Mme Ponard qui sera déportée à Ravensbruck.
Le 10 avril dans la matinée, devant des populations anxieuses, tous sont dirigés vers la gare SNCF où un train les attend, bien entouré par les glorieux nazis, les wagons portent des inscriptions écrites en bon français: “Maquis du Haut – Jura -TERRORISTES”.
Puis, c’est le départ pour Bellegarde (Ain) où dans une école de cette ville, un autre tri s’opère. On sépare du groupe quelques Israélites qui sont aussitôt brutalisés et sur lesquels on lance les chiens.
Trois San-Claudiens – circoncis dans leur jeunesse – sont pris pour des Juifs et embarqués comme tels vers le camp de Drancy. Pour les autres ce sera Compiègne où une dizaine de San-Claudiens viendront les rejoindre quelques jours plus tard. Parmi eux l’ancien maire socialiste M. Jules Mermet limogé par Pétain, ainsi que le maire de l’époque M. Paul Delacour, pourtant nommé par le même Pétain.
La presque totalité des San-Claudiens quittera Compiègne le 12 mai 1944 dans un convoi de 2055 déportés en direction de Buchenwald et ses commandos. Quelques jours après, ceux qui étaient restés à Compiègne seront envoyés au camp de Neuengamme.
Saint–Claude et ses environs immédiats comptent 340 déportés.
Pour 192 d’entre eux, il ne devait pas y avoir de retour à la liberté.
A Saint Sauveur, tout proche, le 11, dans la maison du maire Georges Monneret, qui est fusillé sur place. Son visiteur, Joseph Kemler chef du district A.S. de Saint-Claude est arrêté : dénoncé au S.D., « Gestapo » par un agent de liaison passé à son service, Agenda, Kemler est ramené à Sain-Claude et torturé à mort par Klaus Barbie.
Serge Klarsfeld rapporte dans le Journal du Dimanche du 30 janvier 1983 le témoignage d’un soldat allemand, témoin de ces interrogatoires et des horribles tortures que Barbie a fait subir à Joseph Kemler. A toute interrogation il répondit : « jamais ».
Au Martinet le 11, Une réunion importante est prévue au café-restaurant tenu par M. Joly. Les Allemands font irruption, M. Joly est fusillé sur place. Le commandant Jean Duhail, Vallin, chef du Maquis du Haut-Jura et Agenda agent de liaison, sont emmenés à Saint-Claude. Alors qu’Agenda est relâché, Vallin torturé à Saint-Claude aura une fin tragique à Viry.